Skip links

Mais ils construisent quoi comme horreur?

ou “Ce que peut faire un parti communal en matière d’opposition“. Article coécrit avec Géraldine Bouchez.

Une opposition c’est quoi ?

Une opposition consiste à manifester son désaccord face à un projet ou à une partie d’un projet qui modifie un site en surface ou en sous-sol. Elle est déposée auprès de l’autorité décisionnelle pour la délivrance du permis de construire au moment où le projet est mis à l’enquête publique. Cette mise à l’enquête, avec droit d’opposition, est aussi obligatoire pour les différents plans d’affectation (pour un quartier par exemple), ainsi que les Procédures d’approbation des plans fédéraux (la gare par exemple).

Une fois le délai de la mise à l’enquête publique échu, l’autorité va statuer sur les oppositions en les acceptant (totalement ou partiellement) ou en les rejetant. En cas de rejet de son opposition, l’opposant-e peut faire recours auprès de la Cour de droit compétente. Ceux qui ont le droit de recourir sont les riverain-e-s, la Municipalité de la commune concernée et les associations de protection de l’environnement, de la nature et du paysage autorisées (comme le WWF ou Pro Natura) en vertu d’une ordonnance fédérale.

Que peut faire un parti communal ? L’exemple des Vert.e.s lausannois.es

Les Vert.e.s lausannois.es ne sont pas une organisation habilitée légalement à recourir dans une procédure de permis de construire. Nous choisissons pourtant parfois de déposer des oppositions. Elles permettent d’une part d’attirer l’attention des porteurs de projet sur des aspects contraires à nos valeurs et d’autre part de maintenir la pression aux côtés de riverains et d’associations habilitées à recourir. Nous pouvons ainsi continuer à être informés par les autorités sur le projet concerné par l’opposition. Des séances de conciliation sont aussi organisées, grâce auxquelles le projet peut être modifié pour répondre aux demandes des opposants.

Nous nous battons, par exemple, depuis des années, aux côtés des riverains et d’associations comme Pro Natura, contre un projet de logements à haut standing et de parking à l’Hermitage. La première mouture de ce projet détruisait une partie du cordon boisé faisant face au sud du parc de l’Hermitage (le long de l’avenue Louis-Vulliemin). Le projet a depuis été réduit, un plan de quartier a été proposé et l’impact sur la nature nettement diminué, notamment grâce à la création d’une zone naturelle inconstructible. Des questions restent néanmoins ouvertes. Nous espérons donc que le projet s’améliore encore, grâce notamment à la pression que nous maintenons.

Il est aussi possible pour les citoyen-ne-s et les partis de lancer un référendum populaire lorsque, en fonction de son règlement, le Conseil communal est invité à se prononcer. Dans ce cas, une récolte de signatures (près de 8000 sont requises) est organisée pour permettre aux Lausannoises et Lausannois de voter sur le projet. C’est l’exemple du projet de la tour Taoua à Beaulieu, contre qui les Verts se sont battus aux côtés des riverains en 2014 avec succès.

Affiche-taoua-nonQuand s’opposer ?

Les Vert.e.s lausannois.es soutiennent une densification de qualité à Lausanne. C’est à dire que nous souhaitons voir la ville accueillir plus de logements – afin d’éviter le bétonnage de nos campagnes – mais pas au détriment de la nature, de la qualité de vie et de la préservation du patrimoine. Ainsi, nous voulons, pour notre ville, des quartiers verts, mixtes, favorisant les rencontres et les déplacements en transports publics.

Nous nous opposons donc quand un projet ne respecte pas ces valeurs, lorsque des arbres importants sont inutilement abattus (par exemple pour permettre la construction d’une place de parc), que le projet ne respecte pas le plan partiel d’affectation ou les prescriptions en matière énergétique (cela peut être le cas d’une piscine extérieure). De même, si l’intégration du bâtiment dans les lignes générales du quartier est mal faite ou que les matériaux des façades jurent avec l’environnement construit ou naturel qui se trouvent à proximité de la construction. Nous sommes aussi attentifs à la qualité de vie des riverains : nous ne voulons pas qu’ils subissent de forts préjudices suite à une nouvelle construction, tels qu’une augmentation importante de la circulation, du bruit ou de la pollution de l’air.

Pour finir, il est important pour les Verts lausannois de permettre, dans l’élaboration des grands projets, la réalisation de réelles démarches participatives, au cours desquelles les demandes, propositions et inquiétudes des habitants sont non seulement entendues, mais aussi prises en compte pour co-construire le projet.

À côté de ces oppositions, un parti peut aussi se manifester politiquement pour pousser les autorités à agir: nous avons, par exemple, déposé une interpellation urgente, suivie d’une résolution, pour demander à la Municipalité de Lausanne de protéger le bâtiment du Café Le Tramway à la Pontaise, un des plus anciens cafés de la Ville (et un régal pour les papilles), menacé de démolition. À nos yeux, ce patrimoine bâti, mais aussi culturel, valait la peine d’une double intervention des Verts, civile et politique.

Et quand on ne peut pas faire opposition, il faut alors essayer d’autres solutions, souvent au moyen des instances politiques. C’est le cas, par exemple, au sein des commissions du Conseil communal ou lors des consultations des partis politiques, où nous pouvons donner notre avis et faire des propositions alternatives.

La forêt des Côtes-de-Montbenon au Flon : un bon exemple des possibilités d’un parti pour s’opposer à un mauvais projet

Le barreau routier Vigie-Gonin, imposé comme mesure d’accompagnement à la réalisation du Tram t1, est manifestement un mauvais projet. À l’encontre de toute logique de diminution du trafic, pourtant indispensable à la santé et à la tranquillité des Lausannois-es, il prévoit en effet la construction d’une nouvelle route en plein centre-ville, en détruisant l’un des derniers poumons verts du centre-ville, la forêt du Flon.

Pour éviter ce massacre, nous avons attaqué le projet sous l’angle politique et au moyen d’oppositions:

– une opposition au projet en 2012, suivie de négociations qui ont duré jusqu’en 2014 ;

– une interpellation urgente en 2015 questionnant la nécessité de la rampe ;

– un postulat en 2016 demandant à la Municipalité de trouver des alternatives au barreau ;

– un autre postulat pour demander des mesures d’accompagnement nature en ville, paysage et espaces publics plus conséquents ;

– une opposition à la Maison du livre qui doit être construite sous le barreau (c’est à son emplacement que nous nous opposons et pas au principe, louable, de Maison du livre).

stacked-firewood-1463250303dTc

Voilà, nous espérons que ce petit tableau, non exhaustif, de ce que peut faire un parti dans le cadre des oppositions vous permettra de mieux comprendre les différents fonctionnements de ce système compliqué mais plein de possibilités.