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Notre maison est en feu…

Texte co-écrit avec Sara Gnoni, Conseillère communale lausannoise

Notre humanité se trouve dans une situation d’urgence sans précédent, ici comme partout ailleurs. 

Cette situation d’urgence, si nous n’y répondons pas immédiatement, risque de nous propulser dans la destruction de tout ce qui nous est cher et qui assure notre survie: notre maison, ses habitant·e·s et ses écosystèmes, notre futur et celui des générations à venir.

La science est indiscutable: nous avons provoqué la 6ème extinction de masse, nous avons perdu 70% de vertébrés, plus de 75% des insectes et chaque nouvelle étude, chaque nouveau rapport est plus grave que le précédent. Par exemple, le niveau de montée des eaux attendu jusqu’à présent pour 2100 est maintenant attendu pour 2050 déjà, engloutissant des villes et des régions entières. Cette réalité engendrera des centaines de millions de réfugié·e·s climatiques. Dans nos Alpes, 10% de volume glaciaire a encore disparu en cinq ans.

Absolument tous les voyants sont au rouge et nous n’allons vraiment pas dans la bonne direction: chaque année est pire que la précédente: plus d’émissions de gaz à effet de serre, le jour du dépassement arrive toujours plus tôt, nous produisons plus de déchets que nous recyclons moins, le continent de plastique ne cesse de s’agrandir, la biodiversité continue sa chute libre, les océans se vident, les températures augmentent et battent chaque mois de nouveaux records de chaleur.

Devant les faits scientifiques, pas de doute: nous sommes dans une situation de menace existentielle. Si cette même menace était générée par une autre nation par exemple, nous serions, depuis longtemps, tous et toutes uni·e·s pour y faire face. Mais au contraire, nous faisons face à l’incurie de nos propres gouvernements, qui parlent de raser des forêts pour construire des routes, d’augmenter la capacité des aéroports, de construire des autoroutes à six pistes: nous sommes en train de marcher tels des somnambules vers une catastrophe.

L’ampleur de la tâche pour inverser la tendance est énorme et la fenêtre d’opportunité pour agir se réduit de jour en jour.

C’est dans cette optique que les Vert·e·s lausannois·es ont déposé en janvier dernier le postulat “urgence climatique, il est temps d’agir au rythme exigé par la science”. Il demandait 1) de déclarer l’urgence climatique et environnementale, 2) de dire la vérité sur la crise à laquelle nous faisons face pour obtenir une forte adhésion de la population et 3) de pouvoir accélérer le traitement des objets en lien direct avec la sauvegarde du climat.

S’il a le mérite d’avoir été produit rapidement et de faire l’inventaire de toutes les – bonnes – mesures prises à ce jour, la réponse municipale se félicite de trop petits pas vers la sortie de ce système mortifère.

Surtout, pas de trace des mesures drastiques et sans précédent qui nous sont demandées par la science, dans le SR 15, rapport du GIEC de octobre 2018, pour pouvoir permettre de maintenir l’augmentation de la température globale en dessous de 1.5C° par rapport à l’ère pré-industrielle et préserver rien de moins que la survie des humains dans de bonnes conditions. Dans le domaine de la mobilité d’abord, avec la réduction drastique des voitures en ville. Dans celui de l’alimentation ensuite, avec le passage à une alimentation majoritairement végétarienne et des efforts conséquents pour la réduction du gaspillage alimentaire. Dans ce domaine, il faut aussi passer à une agriculture et une agroforesterie régénérative. Il faut prévoir d’implémenter des solutions de rafraîchissement de la ville pour éviter à tout prix le recours aux climatiseurs qui ne font qu’amplifier le problème du réchauffement de par leur consommation et leur émission de CFC et de HCFC. Et mettre en route le désinvestissement des énergies fossiles bien sûr.

Ainsi, comme toutes les politiques publiques actuelles, partout dans le pays, quelle que soit les majorités en présence, la réponse de la Municipalité de Lausanne n’est pas encore à la hauteur de l’enjeu. Le plan climat du Canton de Vaud, qui tarde à venir, ne donne pas non plus de grands espoirs quand à ses ambitions. La nouvelle loi sur le Co2, traitée par les chambres, reste bien en deçà des besoins réels de réponse à l’urgence. Et les forces écologistes reste encore trop peu nombreuses pour assurer le succès des amendements verts qui ont été déposés afin de renforcer les mesures envisagées.

C’est que les élues et élus se trouvent confronté·e·s à plusieurs obstacle décisionnels importants. Tout d’abord, le manque d’information de la population sur la gravité de l’urgence climatique et les mesures à même d’y répondre, qui font planer le risque de référendums et de contestation populaire. Ce risque est réel, il s’agit donc de mieux informer la population sur les risques qu’elle encourt pour sa survie, sans détour et sans cacher le danger.

L’opposition ou la participation récalcitrante des parlements ensuite, avec une UDC climatosceptique, un PLR sur les pattes arrières qui prétend prendre un virage à 90° en faveur de l’écologie mais ne vote pas en conséquence (soulignons notamment la position du PLR Lausannois, pourtant le plus progressiste du canton, qui a dit que le discours ci-dessus – donc l’énumération des faits scientifiques sur le sujet – devait être fortement combattu) et un PS encore souvent trop ancré dans ses vieux réflexes productivistes, où la voiture, la viande et la consommation sont des marques d’émancipation des classes moins fortunées. Les pressions économiques pour finir, qui pèsent de tout leur poids pour que la situation actuelle ne change pas et ainsi gagner le plus longtemps possible un maximum d’argent en continuant d’exploiter la nature et les humains.

L’urgence actuelle réclame donc du courage politique et des engagements citoyens forts pour soutenir les décisions qui s’imposent. Les élues et élus qui osent les réclamer ont besoin du soutien de la rue, de la pression populaire pour répondre à la pression des frileux·euses et des lobbys. Elles et ils ont besoin que les scientifiques continuent à tirer la sonnette d’alarme, à agiter l’opinion publique. Que les citoyennes et les citoyens secouent l’ordre établit en osant les actes de désobéissance civile. Que toutes et tous prennent conscience de l’ampleur du danger dans lequel se trouve l’humanité, acceptent de participer à l’important changement de paradigme à effectuer et votent en conséquence. La survie de l’humanité est à ce prix.