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Il court, il court le zizi, le zizi de la Place fédérale

Comme présidente de Santé Sexuelle Suisse, je me dois de vous relayer les craintes et les incompréhensions des 54 organisations qui se sont exprimées à la suite des annonces de coupes budgétaires par l’Office fédéral de la santé publique.

Pour rappel, le NAPS a été accepté par le Conseil fédéral en 2023 avec pour ambition d’éliminer la transmission du VIH et des hépatites B et C d’ici à 2030. Les objectifs de ce programme sont ambitieux, atteignables et nobles en matière de santé publique. Pour rappel, le nombre de cas de VIH déclarés à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) est en baisse depuis 2003. Concernant les autres IST, les taux baissent grâce à une meilleure couverture vaccinale (ex. l’hépatite B) ou augmentent  grâce à l’élargissement du dépistage (ex. chlamydias). Dans tous les cas, cela montre toute l’importance du programme NAPS qui porte déjà des fruits. Malgré cela, la baisse de budget prévue le menace directement et c’est une honte !

Ces coupes frappent aussi les personnes vulnérables, qui rencontrent déjà des obstacles d’accès aux soins. Pour elles, la santé sexuelle est souvent aggravée par le manque de moyen, le tabou et la stigmatisation. Une fois de plus, ce sont les personnes en situation de précarité, les jeunes, mais aussi les femmes, les migrant·es, les personnes LGBTQIA+ qui vont payer le prix fort de ces économies.

En Europe, nous constatons une flambée de maladies sexuellement transmissibles qu’on pensait disparues, comme la syphilis ou la gonorrhée. Pour la première, en 10 ans, les nombres d’infections ont doublé et concernant la seconde, dans le même intervalle, le nombre a quant à lui triplé. On n’éteint pas un incendie en réduisant le nombre de pompiers. On ne lutte pas contre les épidémies en réduisant les moyens de prévention.

Ces réductions budgétaires compromettent des décennies de progrès en matière de santé sexuelle. Dès les années 90, la Suisse a été pionnière, saluée au niveau international pour ses efforts dans la prévention du VIH. Ces coupes, c’est un retour en arrière qui entache notre image et notre crédibilité, en Suisse comme à l’étranger.

De plus, il faut le dire clairement : l’inaction coûtera bien plus cher que l’action. Soigner une infection VIH ou une hépatite chronique coûte infiniment plus que la prévention. Par exemple le Clinical Infectious Deases 2019, nous rapporte qu’une prévention efficace du VIH peut permettre d’économiser 8 millions de francs par an, soit environ une économie de près de 400 millions de francs en coûts directs de thérapies et de traitement au cours des 50 ans prochaines années. Faire des économies sur la prévention est donc une illusion budgétaire.

L’État ne peut pas se retirer ainsi de projets aussi importants, en se cachant derrière l’argument d’une cure d’austérité.
Assumer les coupes, c’est assumer de nouvelles infections évitables, des vies brisées et une perte de crédibilité internationale.