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Pourquoi l’avenir est féministe?

Le 9 février 2025, la population suisse aura l’opportunité de choisir un avenir vivable en adoptant l’initiative pour une économie responsable respectant les limites planétaires. Ce choix ne concerne pas uniquement notre environnement, mais engage aussi la lutte contre les inégalités sociales, économiques et de genre. L’écologie et le féminisme partagent un adversaire commun : les systèmes de domination qui exploitent à la fois les femmes et la nature. Comprendre ce lien fondamental, c’est saisir l’urgence d’une approche écoféministe de nos politiques.

Patriarcat et crise écologique: une domination systémique

L’écoféminisme dénonce une vision productiviste d’une société qui traite les corps des femmes et l’environnement comme de simples ressources à contrôler et exploiter. Les ressources naturelles sont épuisées tandis que les femmes sont violentées, privées de droits fondamentaux et reléguées à des rôles dévalorisés. Cette oppression est systémique et souvent liée. Comme l’a par exemple démontré la militante indienne Vandana Shiva, l’agriculture industrielle et les monocultures ont non seulement détruit les écosystèmes locaux, mais aussi marginalisé les millions de femmes agricultrices qui gèrent durablement les terres. Ce constat invite à réinventer nos modèles de production et de consommation pour sortir de ces systèmes destructeurs.

Pourquoi respecter les limites planétaires est indispensable à l’égalité?

Les crises environnementales exacerbent les inégalités et les femmes en subissent les conséquences. Selon l’ONU, 80% des personnes déplacées par des catastrophes climatiques sont des femmes. En Suisse, ce sont aussi elles qui subissent plus directement les effets de la destruction de notre environnement. En cas de canicule ou de contexte allergène aggravé, ce sont les femmes qui assureront la plus grande part du travail de soin, en particulier des aînés et des enfants. Parce qu’elles sont davantage touchées par la précarité, elles auront moins les moyens de déménager au frais ou loin des inondations et des pollutions. Parce que nous devons aussi nous souvenir des mots de Simone de Beauvoir: “il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question”. La crise environnementale ne fait pas exception et les tendances internationales à vouloir, par exemple, restreindre le droit à l’avortement doivent nous alerter aussi en Suisse.

Les conséquences financières, une bombe à retardement

La disparition imminente des glaciers, les inondations dévastatrices en Suisse cet été encore, ainsi que de nombreux événements météorologiques extrêmes en Suisse et dans le monde le martèlent : la crise climatique se déroule ici et maintenant. Les conséquences de la surexploitation des ressources naturelles sont déjà perceptibles aujourd’hui et menacent gravement notre avenir. Il n’y a donc rien d’extrême à vouloir respecter les limites de la planète dont nous dépendons.

De plus, la responsabilité environnementale n’implique pas un retour à l’âge de pierre, comme le laissent entendre les opposants à l’initiative, mais une transformation équilibrée et concertée de notre économie. L’initiative prévoit une transition juste et inclusive.

Pour l’industrie, c’est l’opportunité d’innover dans des technologies propres et durables, accompagnées d’incitations fiscales et de formations spécifiques. Pour l’agriculture, cela signifie des subventions pour l’agroécologie, des aides à la diversification des cultures et un soutien accru aux circuits courts. Pour la population, c’est l’assurance de ne plus subir l’entier du poids de la transition sur ses épaules, sous prétexte de responsabilité individuelle. Les coûts de l’inaction sont bien plus élevés. Les études de l’EPFL estiment à 10 milliards de francs suisses par an les pertes économiques dues au changement climatique (Vöhringer et al., 2019). Attendre n’est pas une option, et les adaptations nécessaires, si elles paraissent coûteuses aujourd’hui, ne le seront que davantage dans le futur.

Passer d’un système exploitant à un système respectueux

Attendre aurait des conséquences sur notre capacité à vivre sur terre, mais aussi sur nos structures démocratiques et nos droits. Respecter les limites planétaires, c’est aussi respecter celles du genre humain et de chaque individu qui dépend de son environnement. Les personnes qui défendent l’égalité, profondément conscientes de l’importance du respect des limites — qu’elles soient personnelles ou de la planète —, portent donc l’initiative pour la responsabilité environnementale comme une mise à jour du système, pour un avenir fondé sur l’égalité, l’équilibre et la justice.

Lien vers l’article du Blick