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La mère de toutes les batailles

Les droits humains ne connaissent pas de frontières. C’est probablement la meilleure synthèse des deux initiatives soumises à votations le 29 novembre prochain. En tant que militante des droits fondamentaux, en tant que militante écologiste et en tant que militante pour la paix, ces deux objets visent notre coeur de cible: l’économie doit être tenue responsable des destructions qu’elle cause sur la seule planète connue à ce jour comme habitable pour l’humain. 

L’initiative pour des multinationales responsable demande l’évidence : respecter les standards humanitaires et écologiques. Comment ? Par un devoir de diligence, c’est-à-dire simplement une obligation de respecter les droits humains, ceci s’appliquant tant aux entreprises basées en Suisse qu’aux filiales contrôlées économiquement par des multinationales suisses.

Actuellement la majeure partie des multinationales respectent les droits fondamentaux, mais quelques tricheuses sont encore de la partie et représentent une concurrence déloyale pour celles qui se comportent dignement. Certaines de ces entreprises scélérates sont basées en Suisse.

Glencore : intoxication aux métaux lourds de 2’000 enfants vivant aux abords d’une mine exploitée au Pérou par l’entreprise de négoce, courtage et extraction de matières premières. Avec pour conséquence, anémie, handicaps, cancers et paralysies.

LarfargeHolcim : au Nigeria, la cimenterie de l’entreprise suisse produit de la poussière et particule fines qui ont des conséquences terribles pour la population riveraine, notamment des difficultés respiratoires, des lésions du foie, des poumons ou de la rate, et des maladies des yeux.

Dans ces deux cas, les entreprises ne sont pas directement impliquées, mais des succursales se chargent du sale travail dans des pays où elles profitent de structures étatiques faibles et encouragent la corruption afin d’exploiter au maximum les ressources du pays. Avec pour conséquences des mort·e·s et des malades par centaines. Il faut agir!

Le Conseil fédéral propose un contre-projet de papier et c’est le cas de le dire: ces entreprises devraient établir des rapports. C’est tout. Aucune prise de responsabilité, aucune mesures pour stopper les violations des droits humains et environnementaux. Pourtant, d’autres pays sont plus responsables: les tribunaux de Grande Bretagne et du Canada ont admis plusieurs fois des actions contre des sociétés mères pour des actions effectuées à l’étranger, la France a une “Loi sur le devoir de vigilance” depuis 2017 et les Pays-Bas depuis 2019. C’est donc possible!

L’initiative contre le commerce de guerre, elle aussi, s’attaque aux gros poissons, aux grandes entreprises productrices du commerce de guerre. Un commerce de guerre qui augmente la menace atomique, qui tue des civil·e·s, qui pollue les sols et détruit les paysages. Qui est concerné par cette initiative ? Uniquement les entreprises qui produisent (pour plus de 5% de leur chiffre d’affaire) des bombes de A à Z, celles qui produisent des armes qui visent à tuer.

Boeing: dont 30 % de son chiffre d’affaires se fait sur l’armement, notamment nucléaire. Son F-15 a été utilisé dans des bombardements de civil·e·s dans la bande de Gaza. Quel lien avec la Suisse ? La Banque Nationale Suisse investissait fin 2019, plus de 500 millions dans Boeing, avec notre argent.

Lockheed Martin: le plus grand producteur de matériel de guerre au monde. Son avion F-16 participe à la guerre au Yémen et tue des millions de civil·e·s. Cette entreprise fait partie des investissements de la BNS.

Tout ce qui à une deuxième utilité civile est exclu. La vis qui compose un tank, mais qui est aussi utilisée sur un camion cargo, n’est pas considérée comme du matériel de guerre. Les composantes militaires, comme les avions Pilatus ne sont d’ailleurs pas non plus considérés par l’initiative. L’objectif de cette initiative est seulement et uniquement que nos caisses de pensions et la BNS n’investissent plus notre argent dans la mort.

D’ailleurs, bien des structures financières fonctionnent avec succès sans le commerce de guerre : la Fondation Ethos qui gère plus de 200 fonds de pension, sans différence de rentabilités. Même chose pour la caisse de pension du Canton de Zurich, l’une des 300 plus grandes du monde. L’UBS elle-même indique d’ailleurs que les fonds durables sont plus rentables que les fonds conventionnels. Les caisses de pensions auraient d’ailleurs gagné 9 milliards de plus en 2019 en privilégiant les fonds verts.

Ainsi, des entreprises suisses et une partie de notre argent tuent, intoxiquent et exploitent des enfants. Est-ce que cela vaut vraiment la peine? Non, car il est tout à fait possible de faire des affaires très profitables sans trahir les droits fondamentaux et sans investir dans le commerce de la mort.

En résumé, le 29 novembre il est question de responsabilité à tous les niveaux. Nous ne pouvons pas d’un côté culpabiliser les familles qui emploient une femme de ménage au noir ou qui se déplacent en grosse voiture, la fameuse responsabilité individuelle, et de l’autre ne pas tenir l’économie suisse pour responsable de ses actes.

Faire en sorte que chaque entreprise, comme chaque personne, soit responsable des conséquences de ses actes sur les humains et l’environnement, c’est la mère de toutes les batailles. Le 29 novembre, c’est deux grands OUI!