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Ne pas priver les femmes de la parole: mon discours pour la fête du nouveau président du Conseil communal

J’ai le plaisir aujourd’hui de remplacer notre collègue Matthieu Carrel pour transmettre à notre nouveau président quelques mots de la part des groupes de notre Conseil. Mais si c’est moi qui m’adresse à vous aujourd’hui, autant vous avouer tout de suite pourquoi : c’est parce que je suis une de ces féministes qui ne laisse rien passer. En effet, à la lecture de l’invitation que nous avons reçu pour la fête de ce soir, j’ai vu avec regret qu’un aucune femme n’était prévue au programme

Je m’en suis donc évidemment plainte à notre nouveau président. Il m’a alors astucieusement proposé de remplacer notre collègue Carrel, qui venait de se désister. Voilà qui nous assure de la finesse de notre président !

Mais pouvons-nous vraiment en lui vouloir de cet « oubli » des femmes dans son programme ? En effet, il a rappelé dès son discours d’installation, qu’il mènerait le Conseil communal comme ses hommes à l’armée. Or on peut penser ce qu’on veut de l’armée – et les avis divergent – mais on peut s’accorder pour dire qu’elle ne fait pas figure d’école de l’égalité.

Dès lors, puisque l’honore de ce discours m’échoit ce soir grâce à mes revendications… et le fait que je sois femme, je vous propose, cher Président, chères invitées et chers invités, de vous faire un petit rappel des raisons pour lesquelles il est indispensable de ne pas priver les femmes de la parole. C’est d’autant plus important pour notre président-gradé qu’au premier rang devant lui se trouve la rangée des 13 élues vertes, rythmée par nos 4 camarades masculins.

Commençons donc peut-être notre rappel par ce bout : malgré ce groupe vert à très forte proportion féminine, le Conseil communal reste majoritairement masculin. Il n’est même pas vraiment proche de la parité. Il n’en a jamais été autrement. Dans une ville à population majoritairement féminine, cela a de quoi étonner. On peut se dire que malgré cela, les partis auront fait attention d’élire des femmes à la tête de leur Conseil, au moins pour le « signal » (concept si cher à certains). Et bien non, ce n’est que très peu le cas, puisque seulement 10 femmes se sont assises au perchoir depuis que les Vaudoises ont les mêmes droits civiques que les hommes (1959).

Comme le rappelait déjà le Conseiller d’Etat Philippe Biéler lors de son mandat (en 1995 donc), « la Suisse croit être une démocratie. En réalité, seule la moitié de la population fait la loi. »

Monsieur le Président, la voix du peuple à laquelle tient tant le parti sous les couleurs duquel vous avez été élu – mais dont vous ne faites plus partie mais dont vous vous réclamez encore (corrigez-mois si je n’ai pas bien compris…) – cette voix du peuple donc, il faut encore le préciser, est constituée à moitié de celle des femmes. La vraie démocratie, que vous souhaitez tant protéger, demande donc qu’on leur donne la parole autant qu’aux hommes. C’est vrai pour l’enveloppe de vote, mais c’est vrai aussi lorsque l’on doit désigner des représentants et des porte-paroles.

Pour illustrer mon propos, je ferai une référence à une autre saga politique que la nôtre, pour laquelle je connais votre faible Monsieur le Président : en chaque femme sommeille une princesse Leia, qui saura mener les rebelles, utiliser la Force et même sauver Han Solo. Ce serait donc une vraie perte pour la Galaxie de ne pas lui donner la possibilité de s’exprimer et de participer à l’effort commun.

Car c’est de ça qu’il s’agit : l’amélioration de notre société ne viendra pas d’une force supérieure, mais bien de nous. Et ce nous, c’est la somme de chacun d’entre nous, hommes, femmes, jeunes et âgés.

Je termine ce petit message par une source de satisfaction. Mes recherches aux archives de la Ville, pour lesquelles j’ai bénéficié de l’aide précieuse de notre Secrétaire du Conseil communal, Frédéric Tétaz, et de Mme Chuard m’ont permis de confirmer que notre nouveau président est le plus jeune président qu’ait connu le conseil communal de Lausanne, et de loin. Dans un souci de démocratie aussi entre les générations, nous ne pouvons que nous en réjouir et lui souhaiter le meilleur pour cette année de présidence, où il pourra faire le lien entre cette somme de chacun d’entre nous, jeunes, âgés, hommes et femmes !

Discours du mardi 23 août 2016