Une réforme bâclée qui coûte à toutes et tous
Au côté d’Adrian Wütrich, président de Travail Suisse, j’ai exprimé mon soutien à l’association Avivo pour démontrer l’inanité de cette pseudo révision.
Il faut le répéter : la réforme de la LPP proposée au vote le 22 septembre est mauvaise. Elle conduit à des pertes de rentes pour les revenus moyens et à des déductions salariales plus élevées sans meilleures prestations pour les bas revenus. En particulier, les femmes ont été trahies par la majorité du Parlement, qui avait promis une amélioration de leurs rentes après l’augmentation de l’âge de la retraite. De plus, les pertes de la génération de transition ne sont pas suffisamment compensées.
Non à une réforme qui trahit les femmes
Les femmes perçoivent des rentes trois fois moins élevées que les hommes. Si elles sont pratiquement à égalité par rapport aux hommes concernant l’AVS, leur situation est en revanche particulièrement précaire dans le deuxième pilier, dans lequel la moitié d’entre elles seulement perçoivent une rente. Et lorsqu’une femme reçoit une rente d’une caisse de pension, celle-ci est en moyenne deux fois moins élevée que celle des hommes. Plus d’une femme sur dix doit faire une demande de prestations complémentaires dès son départ à la retraite. Cette situation n’est pas tenable. En réalité, il faut augmenter les rentes des personnes à faible revenu et travaillant à temps partiel, en particulier des femmes. Le projet de réforme adopté par le Parlement ne fait rien de cela !
Pourtant, lors du vote sur l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes, nous avions dit qu’il était injuste de faire porter la majorité des économies dans l’AVS sur le dos des femmes, alors qu’elles sont déjà ainsi désavantage dans le système de retraite. Les partis bourgeois avaient donc fait campagne pour l’augmentation de l’âge de la retraite en promettant des améliorations substantielles dans le deuxième pilier. Or, le projet ne garde que des miettes de cet engagement. En effet, les suppléments de rente censés compenser la baisse prévue de celles-ci sont beaucoup trop bas et les conditions tellement strictes que seul un nombre limité de femmes en bénéficiera. Beaucoup percevront donc une rente encore plus faible malgré une augmentation des déductions, et ce alors même que l’âge de la retraite des femmes vient d’être revu à la hausse. Les promesses ne sont pas tenues !
Mais encore : la réforme ne prévoit pas la moindre amélioration structurelle pour les femmes, comme l’introduction de bonifications pour tâches éducatives et d’assistance. Cela veut dire que celles qui assurent un travail d’aide non rémunéré s’en verront pénalisées en recevant une rente plus faible. Cette réforme continuera en outre de priver de nombreuses femmes exerçant des emplois multiples, comme les assistantes maternelles ou les agentes de propreté, de rentes du 2ème pilier.
Non à une réforme bâclée
Avant de parler de ces pseudo compensations, il faut rappeler la manière dont les débats ont été menés au Parlement. La commission a été saisie du projet en juin 2021. En première lecture, elle a soutenu le compris des partenaire sociaux repris par le Conseil fédéral, qui réussissait le tour de force de diminuer le taux de conversion tout en maintenant le niveau des rentes, et même en ouvrant la possibilité d’améliorer concrètement et significativement les petites rentes. Les futur·es rentiers·ères et les petits salaires sortaient ainsi gagnants de ce projet, malgré la baisse du taux de conversion demandée par les milieux de la prévoyance et les milieux bourgeois. En août, deux mois plus tard, la commission décide finalement de rejeter ce bon compromis pour adopter un projet qui réduit très significativement les compensations à la baisse du taux de conversion.
Dans le communiqué de presse de la commission (20 août 2021), on peut lire : « avant d’approuver le projet à l’intention du Conseil national, la CSSS‑N souhaite, étant donné la complexité de l’interaction des différents éléments, connaître en détail les conséquences financières de ses décisions […] » Cela donne une idée de la considération de la commission pour la réalité des gens dont les rentes seraient diminuées par cette réforme… Mais surtout, ces « conséquences financières » ne concernent en fait pas l’impact de ces décisions pour les futurs rentiers et rentières, mais le coût global du projet, avec l’idée qu’il doit être le plus bas possible. Voilà pourquoi les compensations sont non seulement basses, mais aussi compliquées et restrictives. De plus, une partie de ce qui est maintenant appelé « compensation » par le Conseil fédéral est en fait simplement une augmentation des cotisations, et donc une diminution du salaire directe, avec un mauvais retour sur investissement. Ce projet signifie vraiment payer plus pour recevoir moins !
Non à une réforme qui pénalise les futurs·es retraités·es
Nous qui nous préoccupons des conséquences financières pour les personnes, nous refusons un projet qui implique une baisse de rente jusqu’à 3200.- CHF par an et, à cause duquel, dans certains secteurs comme la coiffure par exemple, 80% des plus de 50 ans verront leurs rentes baisser malgré le (mesquin) système de compensations mis en place.
La diminution des rentes affecte en effet particulièrement les personnes proches de la retraite, qui n’ont pratiquement plus la possibilité de s’adapter à la nouvelle situation, par exemple en augmentant leur temps de travail. Les suppléments de rente plus généreux négociés par les partenaires sociaux auraient été d’autant plus importants à cet égard. Il n’en reste toutefois plus grand-chose, étant donné qu’un quart à peine de la génération transitoire recevra un supplément de rente intégral, et la moitié partira les mains vides. Les obstacles sont particulièrement importants pour les femmes. Beaucoup en effet n’auront pas droit aux suppléments de rente au motif qu’elles n’ont pas été assurées pendant 15 ans auprès d’une caisse de pension.
En refusant le compromis des partenaires sociaux, la majorité du Parlement a fait preuve d’arrogance et d’intransigeance. Leur politique a déjà fait naufrage lors du vote sur la 13e rente et nous nous engagerons pour qu’il en aille de même pour la réforme de la LPP en septembre !