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Envie d’un cocktail de pesticides de synthèse? Ouvrez le robinet!

Peut-être est-il parfois utile de rappeler que l’eau est la source de toute vie, humaine, animale, végétale et que notre santé est strictement liée à la qualité de l’eau que nous consommons, de manière directe ou indirecte.

Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un véritable cocktail de pesticides de synthèse que nous absorbons quotidiennement. Des mesures ont été faites, au cours des dernières années, dans le canton de Vaud: 50 % des stations de mesure enregistrent des traces de pesticides, 20 % présentent des taux supérieurs à la limite alors que, dans certaines régions du canton, on va jusqu’à 65 % de stations de mesure présentant des taux supérieurs aux limites admises. Cela suscite évidemment des préoccupations et inquiétudes légitimes, d’autant qu’on peut également s’interroger sur les normes en vigueur qui ignore l’effet cocktail et ne tient pas non plus en compte l’effet chronique de l’exposition aux pesticides, notamment dès la vie prénatale, ni leur dimension de perturbateurs endocriniens.

Cette situation demande une nouvelle considération de l’ensemble des paramètres impliqués et une réévaluation des normes actuelles, c’est pourquoi j’ai déposé un postulat au Grand Conseil qui va dans ce sens.

Nous devons agir…

Les pesticides de synthèse sont des molécules, développées en laboratoire et produites en usines, qui lient artificiellement un atome de carbone à d’autres éléments et qui ne sont pas biodégradables.

Ils sont conçus pour détruire des cellules vivantes, ou pour perturber le bon développement ou fonctionnement d’organismes vivants. Tous les pesticides de synthèse sont par conséquent toxiques. Ils se caractérisent également par leur persistance dans l’environnement ; une contamination à large échelle, le transport à longue distance ; la bioaccumulation et la bioamplification. Ils ont des effets cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, perturbateurs endocriniens, neurotoxiques et/ou immunodépresseurs. Suivant le type de culture, d’avril à fin août, des dizaines de ces substances sont épandues entre herbicides, fongicides et insecticides — comme les fameux néonicotinoïdes responsables de l’effondrement des populations d’insectes — sur nos cultures. En 2014, quelques 300 tonnes de glyphosate ont été déversées sur le territoire suisse. Par infiltration, saturant les sols, ces polluants finissent par atteindre les eaux souterraines. Les résultats du dernier rapport de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), Etat et évolution des eaux  souterraines  en  Suisse (OFEV,  2019) révèlent cette pollution préoccupante pour notre santé, 80% de notre eau potable provenant  de ces eaux. L’étude repose sur environ un dixième des 300 pesticides de synthèse autorisés en Suisse, soit sur 45 substances, 28 molécules actives et 17 métabolites, qui en sont les produits de dégradation et sont souvent plus mobiles et plus persistants — par exemple: l’AMPA pour le glyphosate. Entre 2007 et 2016, plus de 50% des stations de mesures ont relevé la présence de plusieurs de ces substances. De plus, 20% des stations présentent des taux de métabolites supérieurs aux limites fixées. Dans les régions soumises à une activité agricole intensive, ce taux grimpe à 65%. La parution de ce rapport a été relayée par la presse — Le Temps, 24heures, RTS — le 15 août dernier, réalimentent les inquiétudes au sujet de l’exposition aux résidus de substances toxiques que sont les pesticides de synthèse et des risques réels encourus par la population. En particulier l’herbicide Chloridazone — interdit en Europe depuis 2018, en réévaluation en Suisse — et le fongicide Chlorothalonil ainsi que leurs métabolites sont cités dans l’article du Temps, car dépassant de loin les seuils limites. Mais au-delà de la question des valeurs limites dépassées pour certaines de ces substances — selon l’Ordonnance du Département fédéral de l’intérieur sur les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les produits d’origine végétale ou animale (OPOVA) — se pose la question d’un  système  d’encadrement — les normes en vigueur — qui ne prend en considération ni l’effet cocktail, ni l’exposition chronique — potentiellement depuis la vie prénatale —, ni l’impact spécifique des perturbateurs endocriniens sur la population et la biodiversité. Ces concepts étant bien connus des scientifiques depuis deux décennies, l’adage «c’est la dose qui fait le poison» est obsolète.

…mais pour de bon !

C’est pourtant bien sur celui-ci que se base toujours et encore ce système, dès lors lui aussi obsolète. Si depuis cet été, le Conseil d’Etat dispose d’un plan d’action visant à réduire l’utilisation du glyphosate, il apparaît dès lors clairement qu’il ne s’agit là que de la pointe de l’iceberg. Dans le contexte du prochain scrutin des deux initiatives «Eau propre» et «Une Suisse sans pesticides de synthèse», j’ai demandé, avec 25 autres député·e·s au Conseil d’Etat d’établir un rapport établissant son plan d’action permettant de répondre aux risques importants pour la santé humaine, animale et pour l’environnement que représentent ces différents produits toxiques. Ce rapport devra notamment rappeler qui est responsable dans le canton des mesures et du suivi des pesticides de synthèse, ainsi que le type d’analyse que le canton peut effectuer dans l’eau, les eaux souterraines, l’air, les sols, les organismes vivants, les aliments et les personnes — urine, sang, cheveux.

Il devra exposer les éventuelles études épidémiologiques permettant de rendre compte du degré de contamination réel par ces substances de la population et des organismes vivants dans le canton de Vaud, en tenant compte, si possible, de l’effet cocktail. Il devra également présenter les mesures prévues par le Conseil d’Etat pour endiguer cette pollution qui menace les êtres humains et leur environnement. En particulier, les priorités d’actions qui pourraient être mises en œuvre pour réduire significativement cette pollution y seront présentées. Concernant les eaux souterraines, le rapport énumérera également les mesures particulières de protection que le canton entend prendre, notamment concernant l’utilisation de produits phytosanitaires de synthèse identifiés comme les plus toxiques.

J’attends que notre Canton prenne les mesures nécessaires pour préserver tant notre santé que celle de notre écosystème. Nous ne pouvons plus continuer à ignorer les conséquences catastrophiques de l’utilisation massive de produits chimiques. Les conséquences, ou les séquelles, sont bien trop importantes.

EN COMPLÉMENT

Postulat Léonore Porchet et consorts – Envie d’un cocktail de pesticides de synthèse? Ouvrez le robinet!

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Résultats de l’Observation nationale des eaux souterraines NAQUA, état 2016

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