#LéoimParlement – session d’hiver 2024
Cette session parlementaire devait permettre des avancées concrètes en matière de santé, notamment avec, enfin, une bonne mise en œuvre de l’initiative Enfants sans tabac, largement adoptée par la population et les cantons en 2022. Pourtant, les débats interminables autour du budget fédéral, qui ont consisté à choisir dans quelles prestations à la population couper pour financer le train de vie luxueux de l’armée, ont phagocyté le temps parlementaire, reléguant des enjeux humains et sociaux au second plan. Cela en dit long sur les priorités actuelles du Parlement. +35% de financement en plus pour l’armement, au détriment de la coopération internationale, des trains de nuit, des crèches, du personnel de la Confédération, des étudiant·es et chercheurs·es, de Pro Helvetia, etc.
Cette obsession des coupes budgétaires (ciblées) s’accompagne d’une indifférence préoccupante face à la baisse de la capacité financière des ménages, exacerbée par des primes d’assurance toujours plus élevées contre lesquelles le Parlement n’agit pas. Ainsi, le dossier électronique du patient, pourtant clé pour une gestion moderne de la santé, a été amputé de 8 millions de francs. Cette décision s’ajoute à d’autres réductions impactant des secteurs essentiels, rappelant que le prix des priorités budgétaires actuelles est souvent payé par les plus vulnérables. À cela s’ajoute un bilan des négociations salariales mitigé pour 2025 : malgré une reprise économique, les salaires réels stagnent, au niveau de 2015. Le dernier rapport de Travail.Suisse révèle que des secteurs déjà précaires comme la santé, la restauration et le commerce de détail peinent à rattraper leur retard, tandis que les primes d’assurance-maladie pèsent toujours plus lourd sur les ménages. L’urgence sociale semble pourtant échapper à une majorité parlementaire crispée sur le frein aux dépenses.
Tradition humanitaire de la Suisse : des débats révélateurs
Le climat mondial actuel tend visiblement la politique helvétique. N’est-ce pas cynique que la Confédération accélère son armement face à un hypothétique conflit mondial tout en diminuant le financement de la coopération internationale? Tout en suspendant les procédures pour les requérant·es d’asile syrien·nes, alors que le pays demeure profondément instable au lendemain de la chute de Bachar al-Assad?
Dans le même temps, le Conseil fédéral et le Parlement décident d’interdire le Hamas tout en continuant à maintenir des relations diplomatiques avec le gouvernement génocidaire d’Israël et sans reconnaître l’Etat de Palestine. J’ai interpellé la majorité et le Conseil fédéral à ce sujet, en rappelant que la branche politique du Hamas n’est pas considérée comme une organisation terroriste par de nombreux pays ni l’ONU, puisqu’il est le parti au pouvoir dans la bande de Gaza et que cette interdiction risque de compromettre le rôle de la Suisse comme médiatrice dans les conflits mondiaux et actrice de la paix.
Primes maladies – toujours pas de vrai volonté de soulager les ménages
Le Parlement planche depuis plus de 5 ans sur des mesures d’économie dans la LAMal, dans l’espoir de baisser les coûts et donc les primes. Mais non seulement cet espoir est assez creux (puisque les primes augmentent plus que les coûts de la santé et que la vraie question est comment les répartir), mais en plus nous n’arrivons à rien. En effet, le Conseil national et sa majorité bourgeoise refusent de soutenir les réseaux de soins et de permettre aux différents fournisseurs de prestations de facturer ensemble leurs services afin de favoriser la coordination et l’interprofessionnalité.
Les réseaux dont il est question, dans le Canton de Vaud, nous en avons depuis des années. Il en existe quatre répartis sur tout le territoire. Ils regroupent des médecins, des services à domicile, des établissements médico-sociaux et des hôpitaux ainsi que d’autres prestataires de soins. Ils offrent ainsi une gamme complète de prestations. Ils ont pour mission l’amélioration de la coordination des soins, l’orientation des usagers·ères et l’utilisation efficace des ressources. Ces réseaux jouent un rôle central dans la prévention et la promotion de la santé en mettant en œuvre des programmes interdisciplinaires. Je donnerai l’exemple du Plan de Crise Conjoint développé par le Réseau santé région lausannoise dont je suis présidente de l’assemblée générale.
J’ai donc vivement défendu cette solution de coordination des soins pour LES VERT·E·S. Cela devient une nécessité absolue ! Or, on voit encore, dans ce débat, que les acteurs·trices aux intérêts divergents continuent de bloquer les réformes nécessaires et les assuré·es continuent de payer l’augmentation des primes.
Le rejet de l’initiative parlementaire de ma collègue Sophie Michaud Gigon en est le parfait exemple. Cet objet demande que soit introduit dans la LAMal un principe de gel des primes, sous forme de moratoire afin d’exercer une pression sur les acteurs du système de santé qui n’ont, pour le moment, aucun intérêt à voir les coûts baissés. J’ai rappelé, dans ma prise de parole, qu’actuellement ce sont c’est sur le dos des assurés que le financement du système pèse le plus lourdement. Les primes, et donc le porte-monnaie des ménages, sont actuellement la seule variable d’ajustement face à l’augmentation des coûts. Les augmentations de primes annuelles représentent toujours plus de pression sur les portes-monnaies des ménages : en 2025, c’est plus 6% en moyenne soit une prime moyenne à 378.70 francs et 21.40 francs d’augmentation! En imposant une contrainte aux acteurs du système pour qu’ils s’entendent sur des réformes nous pourrions obtenir de réels diminutions des coûts. Mais, une fois de plus, la droite du Parlement a démontré son incapacité à réellement soulager les finances des ménages et a rejeté par 129 voix contre 65 ce texte.
Une même ma majorité bourgeoise qui a eu le culot, durant cette session, d’appuyer une hausse de la prime minimale ! Par 114 voix contre 74 voix, le Conseil national a soutenu la motion d’une députée UDC qui charge le Conseil fédéral de modifier le cadre légal “afin que la franchise ordinaire reflète mieux le niveau actuel des coûts dans l’assurance obligatoire des soins”. Autrement dit, de permettre d’augmenter la franchise minimale (actuellement de 300 francs) ! Cela est cynique quand on sait que chaque année en Suisse, 400’000 personnes sont mises aux poursuites par les assurances maladies. Défendre une telle position, c’est renforcer les aspects les plus antisociaux de notre système de santé. LES VERT-E-S défendent quant à elleux, une prime d’assurance-maladie basée sur la fortune et le revenu. Voir ma note de blog à ce sujet.
Mon interpellation sur le masculinisme en Suisse
Le Conseil fédéral a répondu à mon interpellation sur la montée du masculinisme en Suisse, une idéologie valorisant une masculinité toxique et rejetant les avancées féministes. Si le Conseil fédéral a reconnu l’importance de la question et confirmé son intégration dans le Plan d’action national de lutte contre la radicalisation 2023-2027, les réponses restent insuffisantes. La surveillance des forums INCEL est laissée aux cantons et aucune collecte de données spécifiques n’est prévue.
Le masculinisme, phénomène mondial amplifié par les réseaux sociaux, nécessite une approche coordonnée, avec un engagement clair de la Confédération. J’ai aussi questionné le gouvernement sur l’éducation aux médias numériques, la démystification de la sexualité et la sensibilisation des jeunes face aux idéologies anti-égalitaires. Si des initiatives existent, comme les campagnes de l’OFSP sur l’éducation sexuelle, elles manquent de financement, de coordination nationale et de portée concrète pour contrer efficacement ces mouvements. Le Conseil fédéral devrait songer à investir la question sans déléguer, au risque de récolter des données parcellaires inutilisables dans un plan d’action concret et efficace.
Mes objets
- Initiative parlementaire : La répétition de l’analyse de l’égalité salariale par les entreprises doit être la norme sans exception possible. Avec une fluctuation importante du personnel en Suisse, une analyse unique ne suffit pas pour garantir une égalité salariale durable et efficace.
- J’ai déposé une motion pour une fin de grossesse sans danger pour les futures mères et les enfants à naître. Actuellement, 70 % des femmes enceintes sont en congé maladie dans les deux semaines précédant l’accouchement, et les lacunes de protection identifiées par des études pèsent sur leur santé, augmentent les absences non planifiées, les coûts pour les entreprises et favorisent les discriminations
- Enfin, mon interpellation sur la cohérence réglementaire sur le CBD demande une clarification sur le statut du CBN (cannabinol), afin qu’il soit traité de manière cohérente avec le CBD, étant tous deux non psychoactifs et issus du cannabis.
J’ai également posé plusieurs questions :
- Escroquerie concernant les rentes des femmes, quelle suite? Pour faire suite au jugement du Tribunal fédéral, qui a privilégié la sécurité du droit plutôt que la justice pour les femmes, tout en reconnaissant la gravité de la mauvaise information faite à la population.
- Quel soutien pour les cercles de qualité afin de renforcer les échanges de bonnes pratiques dans le domaine de la santé pour une meilleure prise en charge des patient·es.
- Moins d’édulcorants pour les maladies non transmissibles (MNT) : des mesures pour protéger la santé publique face à une consommation excessive.
- Filtres de cigarettes : fact checking du Conseil fédéral qui déclare qu’il est difficile de démontrer des dommages concrets à l’environnement causé par les mégots de cigarettes. L’OFEV publie pourtant une liste des conséquences de ce littering sur l’environnement.