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Non à Frontex

Depuis le 12 décembre 2008, la Suisse fait partie de l’espace Schengen: le territoire de 26 États européens qui fonctionne comme un espace unique en matière de voyages internationaux ou de contrôle aux frontières. Cette association permet de favoriser la mobilité de courte durée entre les États membres, mais signifie également que l’entrée par les frontières extérieures dans cet espace doit s’organiser et être contrôlée de façon uniforme. Les flux migratoires étant actuellement en partie concentrés sur les traversées de la mer méditerranée, l’Union européenne a créé en 2004 l’Agence européenne de garde-frontières et garde-côtes afin d’assurer une gestion des frontières extérieures de l’espace Schengen, qu’on appelle par contraction, Frontex

Dans les missions de Frontex, se trouve le soutien aux États membres dans la gestion de leurs frontières, en identifiant ce qu’ils appellent « des risques migratoires » et d’informer les États concernés. Frontex peut aussi aider les pays lorsqu’ils se disent dépassés par les flux migratoires, en mettant à disposition du personnel et du matériel. Historiquement, le financement de cette agence était cantonné à des contributions volontaires, rendant les interventions peu nombreuses. En réaction aux mouvements de réfugiés syriens en 2015, son mode de financement et ses dotations ont été repensées. Ainsi, l’agence passe de 1’500 garde-frontière à un objectif de 10’000 officiers en 2027, dopant par la même occasion les budgets d’acquisition de matériel. En outre, c’est Frontex qui organise les renvois et les expulsions pour le compte de l’Union européenne, principalement en affrétant des avions. 

Les activités de Frontex sont décriées depuis sa création, mais elles le sont encore plus depuis le renforcement de moyens de 2016. Ainsi, alors que la mission première est d’assurer le soutien opérationnel aux frontières, l’agence a investi l’équivalent de plus de 100 millions de francs suisses dans l’acquisition de drone et d’avion de surveillance plutôt que de se doter en navire pouvant effectuer des missions de sauvetage. Le modèle de drone acquis auprès d’Elbit Systems est par ailleurs conçu en Israël notamment pour des missions de combat dans la bande de Gaza. Les nouveaux moyens financiers sont donc essentiellement orientés vers l’observation, ce qui a permis à Frontex d’identifier à plusieurs reprises des embarcations de réfugiés en difficulté, sans jamais intervenir. La passivité de l’agence n’est malheureusement pas le seul point noir de leurs activités. 

Récemment, et à plusieurs reprises, des navires de garde-côtes bénéficiant de la présence d’officiers de Frontex ont opéré ce qu’on appelle des « pushback », littéralement des opérations de « repoussement ». Ces manœuvres consistent à positionner des navires militaires devant des embarcations pneumatiques usées et surchargées de réfugié·e·x·s, afin de les empêcher d’atteindre les côtes et le territoire Schengen. Cette attitude est le résultat des politiques migratoires de la Turquie et de la Grèce qui espèrent ainsi voir les embarcations retourner d’où elles sont venues. Les garde-côtes grecs renvoient les bateaux vers les côtes turques et vis-versa, créant le tristement nommé « waterpolo grécoturc ». 

S’ajoute à ces pratiques inhumaines, une utilisation généralisée de spray au poivre, de poursuites avec des chiens aux frontières terrestres, par exemple en Hongrie, selon des documents internes à Frontex, publié suite à l’enquête d’ARD, de The Guardian et de Correctiv.

Ces agissements sont le résultat d’une politique européenne isolationniste violente aux conséquences meurtrières. Ce n’est donc pas un hasard si le Parlement européen a décidé en début d’année de ne pas voter la décharge pour le budget 2019 de Frontex. Le journal Le Monde a d’ailleurs pu faire état d’un fort lien avec l’industrie de surveillance et d’armement à défaut de pouvoir obtenir plus de transparence sur le respect des droits fondamentaux dans les agissements de Frontex. La Commission européenne a toutefois refusé de mettre en place un contrôle parlementaire pourtant essentiel. 

C’est dans ce contexte que le Parlement suisse à voter en automne 2021 une augmentation des moyens alloués par notre pays à Frontex, afin de contribuer aux renforcements des prérogatives de l’agence. La subvention suisse passe de 24 millions annuels à plus de 61 millions de francs suisses.

De plus, la Suisse disposant uniquement d’une voix consultative dans les décisions en lien avec l’espace Schengen, elle ne peut intervenir directement sur les décisions et le cadre dans lequel Frontex évolue. Toutefois, nous sommes en mesure de décider quel soutien nous accordons à ces pratiques mortifères. C’est pourquoi « Migrant Solidarity Network » a lancé, avec le soutien des VERT·E·S et des Jeunes Vert·e·s, le référendum contre cette augmentation. C’est la seule possibilité pour nous de ne pas cautionner cette attitude inhumaine dont fait preuve l’Union européenne et de montrer à Frontex, que certains membres de Schengen, contrôlent son action et qu’ils prennent des sanctions lorsqu’autant de limites ont été dépassées. Signez donc au plus vite ce référendum et pensez à faire signer autour de vous également, le comité étant un collectif citoyen, tout soutien est plus que jamais précieux et utile.