Une enquête aux résultats inquiétants
En novembre 2017, l’IUMSP (Institut universitaire de médecine sociale et préventive) publiait une enquête populationnelle sur la victimisation et la délinquance chez les jeunes des cantons de Vaud et Zurich. Sur financement de l’association VoGay, l’IUMSP a extrait des données de cette enquête permettant de répondre à cette question : les jeunes non exclusivement hétérosexuel-le-s sont-ils une population davantage exposée ?
L’enquête, menée auprès de 2500 élèves vaudois 11ème HarmoS (env. 15 ans), intégrait pour la première fois une seule et unique question concernant l’orientation sexuelle des élèves. À partir de cette information, l’IUMSP a découvert des chiffres très inquiétants sur l’exposition à la violence des jeunes LGB. Par exemple, 8,7% d’entre eux ont été victimes de violences sexuelles contre 2,7% des élèves exclusivement hétérosexuel-le-s et 18,1% ont été victimes de harcèlement, contre 4,2%. Leur état de santé est tout autant préoccupant, avec des inquiétudes importantes concernant la dépression, les risques de suicide et la consommation de drogue.
Cette étude est la seule étude vaudoise menée en population générale s’intéressant à l’orientation sexuelle. Grâce à cette large « banque de donnée », elle a permis de mener des analyses approfondies sur les minorités sexuelles et leur qualité de vie.
Une enquête de victimisation et de délinquance a été menée auprès des jeunes de 17 ans en 2017. Cette étude comprend plusieurs questions permettant de mesurer l’orientation sexuelle et ajoute une question sur l’identité de genre, permettant ainsi de prendre en compte les jeunes trans. Le rapport suivant cette étude est prévu pour mars 2018.
Considérant ces faits, j’ai posé les questions suivantes au Conseil d’Etat :
- Le Conseil d’Etat a-t-il connaissance du résultat de cette étude ?
- Comment le Conseil d’Etat juge-t-il les résultats de cette étude ?
- Considérant les inquiétudes que peuvent susciter les résultats de cette étude, le Conseil d’Etat a-t-il prévu de mettre en place des actions ?
- Si oui, lesquelles ? Si non, pourquoi ?
- Le Conseil d’Etat envisage-t-il de soutenir l’association VoGay de manière plus importante afin qu’elle puisse intensifier son action de prévention et de médiation, mais aussi poursuivre ses efforts d’analyse ?
Ces questions devraient permettre d’ouvrir la porte à des mesures de la part du Conseil d’Etat pour protéger et entourer les jeunes LGBT dans les écoles vaudoises, ainsi que pour soutenir plus fortement l’action des associations.
Les acteurs ont des solutions
Confirmant ce que constatent les acteurs sur le terrain, les résultats de cette étude montrent que les écoliers et écolières LGB vivent dans un risque important de violence et de péril pour leur santé. Il est aussi utile de préciser qu’il suffit de faire naître le soupçon d’homosexualité pour souffrir d’homophobie, sans pour autant être soi-même LGB. En ce qui concerne les jeunes trans, des chiffres provenant d’autres pays montrent que 77% d’entre eux et elles rapportent avoir subit du harcèlement et 80% annoncent avoir déjà eu des idées suicidaires. 40% font une tentative!
En résumé: les jeunes LGBT du canton ne vont pas bien et c’est en partie due à l’ambiance homophobe qui règne dans les écoles vaudoises. Ce climat hostile est observé et rapporté par celles et ceux qui sont en contact avec ces jeunes. J’ai eu la chance, le 23 novembre dernier, de modérer une table ronde pour VoGay avec des intervenants et intervenantes passionnantes. J’aimerais rapporter ici quelques unes de leurs suggestions.
- Le plus porteur est d’éduquer de manière égalitaire!
- Aller dans les établissements pour donner de l’information reste difficile, mais cela fonctionne.
- Des guides de bonnes pratiques existent et devraient permettre aux enseignant-e-s de donner des réponses adéquates à des situations délicates. Par contre, les enseignant-e-s ne sont malheureusement pas formés à ces questions, puisque ni PROFA ni les associations de prévention en santé sexuelle n’ont accès à la HEP.
- Le manque de moyen et l’absence de pérennisation des financements sont les risques principaux auxquels sont confrontés les associations et projets contre l’homophobie et la transphobie.
- La loi est clairement insuffisante, alors qu’elle permettrait de s’appuyer sur un cadre et de donner de la légitimité au discours contre l’homophobie et la transphobie.
- La solidarité entre les paires est un soutien précieux. Des structures comme des lieux d’écoute, telles que le met en place VoGay, devraient être mieux soutenues par les pouvoirs publics.
- La visibilisation de l’homosexualité et de la communauté LGBT* permet de donner des repères et de désigner des alliés aux élèves qui cherchent le dialogue et des conseils.
Pour finir, il est important de rappeler que l’école n’est qu’un des lieux où les violences contre les LGBT* s’expriment et qu’un seul des lieux où les jeunes sont socialisés. Dans ce cadre, donner aux acteurs la possibilité d’intervenir dans des cercles comme les associations sportives, le milieu médical, auprès des éducateurs, etc. est tout aussi fondamental.
Les intervenant-e-s ont tenu à rappel que chacune et chacun, nous pouvons agir à notre niveau, car nous avons toutes et tous un pouvoir d’action en ne laissant pas passer des insultes homophobes et transphobes. Lorsque nous intervenons et dénonçons l’insulte, nous contribuons à diminuer un climat de société qui, actuellement encore, favorise les discriminations et les violences envers les membres de la communauté LGBT, notamment ses membres les plus fragiles que sont les jeunes.