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Initiative enfance sans tabac : la droite addicte à ses lobbys

Le 13 février 2022 nous fêtions l’acceptation par la population suisse et les cantons de l’initiative “enfants et jeunes sans publicité pour le tabac”. Lors de la session de printemps 2024 le Conseil national devait se prononcer sur la future Loi sur les produits du tabac (LPTab). On devait se réjouir de ce 29 février 2024 et de l’aval de la chambre basse à l’interdiction de toute forme de publicité pour le tabac accessible aux enfants. Toutefois, malgré l’engagement des VERT·E·S, le Parlement s’est assis sur les principes de l’initiative, l’avis du personnel de santé et la volonté populaire. 

Et pourtant, il est bon de rappeler que le tabac représente 9’500 décès par an. Le tabac représente aussi la première cause de mort évitable dans le pays. Le profil des consommateurs et consommatrices est aussi connu de longue date : 60% d’entre elles et eux commençant lorsqu’ils sont mineurs. L’initiative lancée par les milieux de la santé intervient donc à pic. L’enjeu n’est pas de culpabiliser et charger les fumeuses et fumeurs d’aujourd’hui, mais d’éviter que l’industrie du tabac n’enrôle de nouvelles consommatrices et de nouveaux consommateurs. 

En dépit de ce que nous disent les premiers concernés par le traitement des maladies induites par le tabac et de la volonté populaire de 2022, le parlement a décidé de ne pas mettre en œuvre l’initiative. Et pourtant le texte de l’initiative était clair : toute forme de publicité, quelle qu’elle soit, est interdite lorsqu’elle peut atteindre les jeunes. Qui plus est, le large Oui des urnes est aussi un vote sanction contre un parlement complaisant avec l’industrie du tabac.

Bien que le Conseil fédéral proposait un projet respectant le contenu de l’initiative, le Conseil des États et le Conseil national ont décidé qu’il fallait l’affaiblir. L’affaiblir à tel point que le projet présenté par la majorité bourgeoise ce printemps à Berne était à certains égards moins protecteur que le contre-projet à l’initiative auquel la population et les Cantons ont préféré l’initiative. Ainsi, il a été proposé d’autoriser la publicité accessible à plus de 10’000 mineurs par publication et d’autoriser la publicité si un site est muni d’un système de contrôle de l’âge du type de celui par lequel il suffit de cliquer “oui” à la question “êtes-vous majeur?”. Il a aussi été proposé d’autoriser le parrainage d’événements ou encore la vente mobile de cigarette dans les espaces publics accessibles aux mineurs. Et parce que le ridicule ne tue pas (contrairement aux produits de tabac), 91 de mes collègues (parmi lesquels les vaudois Michaël Buffat, Olivier Feller, Sylvain Freymond, Jacques Nicolet, Yvan Pahud et Daniel Ruch) ont tenté de rendre inapplicable l’ensemble de l’interdiction de la publicité pour les mineurs s’agissant des cigares et cigarillos (sans que cela ne résulte d’ailleurs d’une quelconque considération scientifique… ou logique). 

Cette attitude de la droite parlementaire (pour les plus motivé·e·s d’entre vous, n’hésitez pas à écouter les débats à Berne ou le débat que j’ai mené dans l’émission Forum) nous démontre au moins deux choses. La première est que les lobbys du tabac ont une réelle emprise au Parlement. Que des cigarettiers financent les campagnes électorales des groupes cherchant jour après jour à affaiblir le projet de loi d’application à l’initiative le souligne aussi. On notera par ailleurs la présence au Conseil national du président de Swiss Tobacco. La deuxième conclusion de cette session est que les partis se targuent d’être les seuls garants de la volonté populaire et de la Constitution ne jouent pas ce rôle lorsqu’il s’agit de la santé de nos enfants.

Mais nous ne lâchons rien! Finalement, nous avons refusé cette loi d’application alibi, l’ouvrage sera donc bientôt de retour sur le métier du Parlement.

La photo illustrant cette note a été transmise par la Ligue Pulmonaire qui a, durant la session de printemps 2024, organisé une présentation des nouveaux produits des lobbys du tabac. Attractifs, colorés, ces puffs ou autre cigarette électronique sont de vrais aimants à jeunes. Seriez-vous les retrouver dans la photo ci-dessus?