La session d’été 2020 a permis de belles avancées sociales comme des reculs dangereux en matière de défense des droits fondamentaux. Une session en demi-teinte.
Lutte contre la hausse des primes
Chaque année, l’augmentation des primes étrangle un peu plus une partie de la population. Face à la hausse constante des coûts de la santé, le Conseil Fédéral a décidé de réagir en proposant deux volets de modifications légales dont le premier a été voté durant cette session. Le projet part donc d’une bonne intention, mais il est trop timide. Malheureusement, la plupart des propositions d’amélioration portées par les Vert·e·s ont été refusées. Le plénum a par contre obtenu un belle avancée pour les associations de patient·e·s, qui reçoivent un mandat afin d’aider leurs membres à mieux comprendre les factures reçues.
Essais pilote sur le cannabis: enfin!
La modification de la loi sur les stupéfiants permettant les essais pilotes de consommation récréative de cannabis a été acceptée par le Conseil national. Cela permettra d’obtenir des données réelles sur la consommation de cannabis pouvant ensuite amener à une adaptation de notre législation à la réalité du terrain, aux besoins réels de la police et de la prévention en santé. De plus, sur l’impulsion des Vert·e·s, le cannabis utilisé pour ces essais sera suisse et bio!
L’État de droit sacrifié à la lutte contre le terrorisme
Le Conseil national a choisi de renforcer le droit pénal avec une définition floue du terrorisme et des peines lourdes pour des activités non criminelles, sous prétexte de répondre au Protocole additionnel de la Convention du Conseil de l’Europe pour la lutte pour le terrorisme. Il a aussi accepté de mettre en place des mesures policières “préventives”, c’est à dire de permettre à la police, sans jugement ni procédure de recours complète, de restreindre gravement les libertés et droits de personnes coupables de rien du tout, mais seulement soupçonnées. Ces mesures s’appliquent aux enfants! Les Jeunes Vert·e·s vont demander un rapport au comité d’expert·e·s indépendant·e·s chargé·e·s de surveiller l’application de la Convention internationale des droits des enfants.
Oui au mariage pour tou·te·s
Le vote historique du Conseil National apportant enfin l’égalité pour les couples homosexuels est l’un des résultats réjouissants de cette session. Le projet intègre même la PMA pour les couples lesbiens. 20 ans après la 1ère proposition de la verte Ruth Genner, enfin nous avançons vers l’égalité. Espérons que le Conseil des États confirme cette décision et place la Suisse du bon côté de l’histoire.
Un débat d’actualité sur l’égalité
Un an après la grève du 14 juin et face à la crise du coronavirus, le Parlement a ENFIN pris le temps de débattre de la situation des femmes dans notre pays, sur une demande des Vert·e·s soutenue par le PS et les Vert’libéraux. Cela nous a permis de rappeler que les applaudissements ne suffisent pas et qu’il faut revaloriser les conditions de travail et les salaires des femmes. Des objets sur la garde des enfants, l’égalité salariale ou encore les droits sexuels vont bientôt arriver sur la table pour que les belles paroles se concrétisent!
Une motion de la présidente des Vert·e·s Regula Rytz demandant une campagne nationale de grande envergure contre le sexisme a été adoptée dans la foulée. Une grande satisfaction, mais aussi un plaisir pour la dernière session de notre présidente à la tête du parti, remplacée le 20 juin par Balthasar Glättli.
Quelques votations en bref:
- La loi sur le CO2 a été acceptée par le Parlement. Si elle n’est de loin pas suffisante pour respecter nos engagements pris avec l’Accord de Paris, c’est déjà un bon premier pas, qu’il va néanmoins certainement falloir défendre face à un référendum.
- Surprise aux votes finaux : la loi punitive pour durcir le service civil a finalement été rejetée avec 13 voix d’écart!
- Le contre-projet alibi à l’initiative pour des multinationales responsables du Conseil des États, qui ne répond en rien aux demandes initiales, a été accepté. Rendez-vous devant le peuple!
- La rente-pont pour les chômeurs·euses âgé·e·s a été acceptée. Bien qu’elle soit très loin d’être généreuse, c’est déjà une bonne nouvelle et un outil supplémentaire pour combler les trous du filet social suisse.
- L’engagement suisse au sein de la KFOR a été inutilement prolongé au lieu de renforcer l’aide au développement, l’effectif militaire a même été renforcé, dans un pays où il n’y a plus de conflit armé!
- Le Parlement a soutenu la modification urgente de la loi sur les épidémies pour permettre la création de l’application Swiss COVID. Face aux questions encore latentes sur l’implication des GAFA et au manque de garanties sociales pour les personnes recevant une notification, je me me suis abstenue.
- Le Conseil des Etats a continué à vider de sa substance le contre-projet à l’initiative pour des soins infirmiers forts, même après la preuve du besoin et de l’urgence apporté par la crise du coronavirus. Là aussi, nous irons devant le peuple s’il le faut!
Objets déposés
Durant cette session, j’ai déposé une motion demandant une nouvelle définition du cannabis afin de charger le Conseil fédéral de réviser la nomenclature législative de la LStup de sorte à ne plus prohiber la plante de cannabis comme une substance psychotrope, à considérer dans la loi la seule substance active des produits et non plus la plante entière et à adapter en conséquence l’article 8d de sorte à désigner les effets psychotropes.
J’ai aussi posé une question touchant à la désinfection des salles de classes liée à la pandémie de coronavirus afin de m’assurer que le remède ne soit pas pire que le mal. Dans sa réponse, le Conseil fédéral annonce ne pas prendre de mesure particulière, alors que ces produits posent de vrais problèmes pour le développement des plus jeunes. J’ai aussi posé une question demandant quelles mesures avaient été entreprises contre les violences LGBTQ-phobes pendant le semi-confinement. Un environnement familial plus hostile ou une augmentation de la violence sur les réseaux sociaux ont été effet été observés par les milieux spécialisés. La réponse écrite du Conseil fédéral est plutôt de nature à démontrer qu’il y a encore beaucoup à faire pour que ces violences spécifiques soient correctement adressées.
Pour soutenir les proches aidant·e·s, j’ai déposé une interpellation demandant au Conseil fédéral comment il évalue la situation de ces personnes compte tenu de la pandémie de coronavirus et de quelle manière il était prêt à accélérer le processus afin que la loi sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et la prise en charge de proches puisse déployer ses effets dans les meilleurs délais.
J’ai aussi déposé une interpellation pour ouvrir un débat national sur les droits sexuels et l’autodétermination des personnes handicapées, qui ont été arbitrairement réduits – et parfois très longtemps dans certains cantons – pendant la crise sanitaire. Une autre interpellation demande au Conseil fédéral de se positionner quant au caractère social de nos facteurs et factrices, qui ont été particulièrement sollicité·e·s pendant la période de crise et ont ainsi démontré, s’il le fallait encore, leur indispensable rôle de service public. Pour finir, j’ai interpellé le Conseil fédéral sur le besoin en prévention quant au lien entre alimentation et pandémie.
Photo illustrant l’article prise par Béatrice Devènes